FEUX À RÉPÉTITION : L'autre conséquence de la canicule
Article du 09/07/2025 à 13h00
La Tramontane, un « accélérateur » de feu sur un sol asséché : l’analyse météo
Les images des collines en feu et les panaches de fumée qui s’élèvent dans le ciel de l’Hérault ont marqué les esprits ces derniers jours. Du massif de la Gardiole près de Mireval à la garrigue de Montagnac, la même question se pose : pourquoi une telle violence, si soudainement ? La réponse ne se trouve pas dans le hasard, mais dans une analyse météo très claire. Ces incendies sont le résultat d’une combinaison redoutable entre un « combustible » préparé de longue date et un « accélérateur » puissant : la tramontane.
Un paysage transformé en « combustible » par la canicule
Le premier ingrédient de cette recette dangereuse a été mis en place par la canicule que nous venons de traverser. Pendant des semaines, les fortes chaleurs et le manque de pluie ont littéralement « cuit » la végétation, malgré un hiver et un printemps bien arrosés !
Des plantes assoiffées : la garrigue, les pinèdes et les herbes basses ont puisé dans leurs réserves d’eau jusqu’à s’assécher complètement en surface.
Un sol qui a soif : le sol lui-même a perdu une grande partie de son humidité.
Le résultat est un paysage entier transformé en un immense stock de combustible très sec, où la moindre étincelle peut démarrer un feu. La canicule a préparé le terrain, laissant un département entier prêt à s’enflammer.
La tramontane, le facteur de trop qui transforme l’étincelle en brasier
Si la sécheresse est le carburant, la tramontane est l’allumette qui embrase tout. Ce vent de nord-ouest, sec et fort, est bien plus qu’un simple courant d’air ; c’est un véritable accélérateur de feu. Son rôle est double :
Il « souffle sur les braises » : en apportant constamment de l’oxygène, la tramontane suralimente le feu, le rendant plus chaud et plus intense. Les flammes deviennent plus hautes et plus puissantes.
Il propage le feu à grande vitesse : le danger majeur de ce vent, ce sont ses rafales. Elles sont capables de transporter des morceaux de végétaux enflammés (des brandons) à des centaines de mètres en avant du front de flammes principal. C’est ce qu’on appelle les « sautes de feu ». Un nouveau foyer peut ainsi démarrer loin devant, piégeant parfois les pompiers et rendant leur lutte extrêmement difficile.
Le résultat : les feux de la Gardiole et de Montagnac en sont la parfaite illustration
Ce que nous avons vécu ces derniers jours est un cas d’école de cette synergie :
Dimanche dans la Gardiole : le feu parti de Fabrègues a trouvé un terrain idéalement sec. Poussé par des rafales de tramontane, il a pu monter et dévaler les pentes du massif à une vitesse impressionnante, laissant derrière lui un paysage de désolation.











- Mardi près de Montagnac : le même scénario s’est répété. Sur une végétation tout aussi sèche, le vent a rapidement transformé un départ de feu en un incendie majeur, nécessitant l’intervention de très importants moyens aériens et terrestres. Plus d’une dizaine de départs de feux ont d’ailleurs dû être contenus ce jour-là. Y compris un départ dans la Gardiole, au niveau de Gigean
Merci aux pompiers
Face à la fureur de tels brasiers, il est essentiel de saluer le courage et l’engagement sans faille des centaines de sapeurs-pompiers de l’Hérault, souvent rejoints par des colonnes de renforts venues de toute la France. Dans des conditions extrêmes, luttant contre la chaleur des flammes, la fatigue et un vent qui peut transformer un front de feu en piège en quelques secondes, leur travail relève de l’héroïsme. N’oublions pas non plus les pilotes des Canadairs, Dash et hélicoptères bombardiers d’eau, dont les largages précis et risqués sont un appui indispensable pour freiner la course des flammes et protéger les vies et les habitations.
La météo crée le danger, l’Homme déclenche l’incendie
La sécheresse héritée de la canicule et la puissance de la tramontane ne sont pas la cause du départ du feu. En revanche, elles créent des conditions de propagation si explosives qu’elles transforment la moindre étincelle en un brasier incontrôlable. La météo prépare la scène du drame, elle tend le piège.
Or, il faut le rappeler, plus de 9 feux sur 10 sont d’origine humaine. Le feu qui a ravagé la Gardiole n’est donc pas une fatalité « naturelle ». C’est la rencontre tragique entre ce risque météo maximal que nous pouvons prévoir, et un acte humain (imprudence, accident, malveillance) que nous pouvons éviter. Puisque nous ne pouvons pas empêcher le vent de souffler, la seule variable sur laquelle nous pouvons agir est notre propre comportement. La météo nous donne l’alerte ; à nous de lui apporter la seule réponse qui vaille : une vigilance et une prudence absolue.